( two years ago. )
tw : tentative de suicide

il a l'esprit embrumé, mio. il a l'impression de se voir danser, virevolter sur des scènes si grandes qu'elles ne font que le rendre plus nauséeux. il observe sa silhouette se mouvoir sur les planches en bois face à un public aux visages si flous qu'il est obligé de s'approcher ; presque plisser les yeux. encore. encore un peu. son corps est léger comme une plume, il s'envole dans les nuages qu'il tente de toucher du bout des doigts. l'état est fragile, si fragile... qu'a-t-il fait ou qu'a-t-il pris ? mio ne s'en souvient pas bien. quelque part, au loin, il entend des voix, des bruits. que se passe-t-il ? n'est-il pas en train de réaliser l'un de ses rêves ? il ne se rend compte de rien sinon de la chaleur au creux de sa main qui a remplacé les petites pilules qu'il avait choisi. ah ! elles ont glissé le long de sa gorge pour atteindre son estomac. les unes après les autres. mio ne se souvient pas bien de combien. combien de cachets péliculés il a avalé. cinq, dix ou quinze, qu'importe à présent. il a l'impression tout à coup que son poids est retombé. il a très mal à la tête. il ressent des présences, de l'agitation autour de lui. mio est dans un état second. il a aussi très mal à l'estomac. il a envie de vomir. de pleurer. de tout oublier. parce que, petit à petit, il commence à se rappeler ce qu'il a fait. pourtant, rien ne vient. ou alors est-ce un mauvais rêve ? la sirène de l'ambulance, le visage de sa mère. le bruit des machines. le corps secoué de petits spasmes avant de sombrer... il ignore combien de temps passe avant qu'il ne rouvre tout à fait les yeux. la blancheur de l'endroit lui saute aux yeux. il gémit légèrement, les lèvres sèches. la gorge douloureuse. une silhouette dans un coin de la pièce. - où... mais les mots brûlent dans sa trachée. où suis-je ? voudrait-il dire. à l'hôpital. gamin de dix-huit ans qui a tenté d'en finir. mio... qu'as-tu fait ?

 @Georgia Blake

( two years ago. )
tw : tentative de suicide

La matinée a défilé rapidement. Le temps a manqué de secondes, de minutes voir même d’heures. Une sensation qui gagne de plus en plus chacun des jours qui passent. Il y a deux ans à peine, tu donnais la vie à ta petite poupée qui aujourd’hui à déjà bien grandit - trop grandit. Tu n’as pas le temps de toujours être là mais tu n’as pas d’autres choix. Le travail est nécessaire pour payer les factures, mais surtout pour subvenir au besoin de chaque jour. Fort heureusement, tu peux compter sur London pour veiller sur elle en ton absence. Il y a un peu moins d’une heure, tu as reçu un appel de la part de ton supérieur : le médecin en chef des urgences pour la nuit. Il t’a demandé si tu pouvais être là dès que possible car deux de tes collègues n’ont pas assuré leur tour de garde. C’est vrai que dernièrement, nombreuses sont les infirmières se plaignant de leurs conditions de boulot. Tu peux le comprends, mais de ton coté tu n’as pas le loisir de te plaindre ou de faire la grève. D’abord parce que vos patients n’y sont pour rien dans cette situation et parce que tu as responsabilités. Un terme qui te suit depuis toujours et ta figure maternelle n’est guère étrangère à l’affaire.

Trois heures et un tas de patients plus tard, tu pousses enfin la porte de la salle de repos où tu te laisses choir sur le premier fauteuil. Tu soupires en fermant les yeux, passant ta main sur le sommet de ton front. Un peu de calme, après tant d’heures accumulées. Une secrétaire a l’accueil des urgences t’a demandé comment tu faisais pour rester debout. La pensée de ta petite fille t’est tout naturellement venue à l’esprit. Au même moment, ton frère t’appelle et tu décroches. Vous échangez quelques minutes et il te confie que tout se passe bien, que tu n’as pas à t’en faire et tu finis par couper l’appel. La porte s’apprête à s’ouvrir et tu entends une conversation concernant un patient arrivé il y a moins de deux heures. Un jeune homme qui aurait voulu tenter de se suicider. C’est toujours triste à entendre surtout à un si jeune âge. Tu te lèves, le fil de la discussion accompagnant tes pas jusqu’à la porte de la chambre de patient. Tu la pousses, et refait coulisser derrière toi. En effet, le jeune homme semble jeune, trop jeune. Alors que tu regardes son dossier, tu le vois papillonner des yeux et tenter de prononcer une parole qui ne vient pas. Tu délaisses le dossier au pied de son lit, le redressant tout doucement. « Ne vous forcez pas, je vais vous aider à redresser en douceur, voilà c’est ça doucement … ». Une fois bien calé contre les oreillers, tu prends son pouls et t’attèle à vérifier son état.

 @Mio Yun

( two years ago. )
tw : tentative de suicide

mio revient petit à petit à lui. il a l'impression d'être dans du coton. tout semble tourner autour de lui. il a la bouche sèche, pâteuse. la luminosité lui fait mal aux yeux. il essaie de bouger un peu et c'est à cet instant que la silhouette au pied de son lit se rapproche. qui est-ce ? il voudrait lui dire non, lui demander de partir, mais il se laisse faire. incapable de bouger, incapable de prononcer le moindre mot supplémentaire. chaque effort est douloureux. sa vue lui permet enfin de deviner que la personne est une femme, probablement une infirmière. elle commence à lui faire des examens et mio se demande tout à coup pourquoi il est là. ce n'est qu'à la vue du bandage fait autour de son avant-bras gauche qu'il se souvient. tout lui revient d'un seul coup et s'il tourne la tête pour qu'elle ne les voit pas, les larmes glissent sur ses joues. mouillent le drap blanc dans lequel il est assis. il essaie de retenir des sanglots et ça bloque, ça fait mal dans la gorge. il se sent tellement idiot, insignifiant. toutes ces années, ce sont eux qui avaient raison ; toutes les moqueries, toutes les méchancetés dont il a été victime. il n'est même pas capable d'en finir correctement... - p-pardon. il tente de dire. il renifle et essuie le bout de son nez. les yeux rougis, quelques spasmes s'échappent de sa poitrine. il n'ose pas croiser le regard de la soignante. mio laisse l'arrière de son crâne retomber sur l'oreiller et ses yeux se perdre sur la blancheur immaculée de la petite chambre. il a pris des cachets et le personnel médical en a profité pour cacher les entailles sur son bras. mio a l'impression que tous ses secrets sont exhibés. il se sent complètement mis à nu, ne sait pas comment réagir.

 @Georgia Blake