Pendant la nuit d'halloween

Qu’est-ce que ce mois d’octobre a été intense et chargé ! Entre colloques, congrès, conférences et autres rencontres, je n’ai pas vu le mois passé. J’ai à peine été à la maison et encore moins à mon bureau à l’hôpital. J’ai demandé à Cléo de me tenir au courant pour Clay puisque j’étais très inquiète de laisser mon grand-frère seul, même si Cléo était présente. Mais elle est toute douce. C’est un rayon de soleil ma petite sœur. Je n’avais pas envie de la laisser gérer Clay alors qu’il va s’y mal. Il a tout de même crié sur moi après avoir briser un verre. Et je sais qu’il cache des bouteilles partout dans l’appartement. Alors non, je n’avais vraiment pas envie de laisser ma sœur gérer notre grand-frère toute seule. Et encore moins lorsque je l’ai vu s’y perdu et inquiet lorsqu’il a vu Aiden faire sa crise d’épilepsie. Mais je ne pouvais pas me dérober de ses obligations. Alors je n’ai pas eu le choix de partir. Et pour être honnête… Ça m’a fait le plus grand bien. Je n’ai pas été aussi bien depuis tellement longtemps. Je sais que ça a fait plaisir à Charles de me voir reprendre le cours de ma vie, même si ce n’était que pour un temps. Ce mois-là m’a vraiment rappelé pourquoi j’aime mon métier. Pourquoi j’ai voulu devenir psychiatre. Bon, c’est vrai aussi que j’ai appris que Cole, mon autre grand-frère, était en ville et j’ai sorti les griffes pour protéger Clay. À part ce moment, j’ai passé un très beau mois.

Et je le termine ce soir, dans une boîte de nuit, pour fêter l’halloween avec des amies. Et qu’est-ce que je m’amuse. J’oublie tous les soucis qui pèsent sur mes épaules pour me concentrer juste sur l’insouciance que je devrais vivre. J’oublie que Clay a un sérieux problème avec l’alcool et qu’il n’arrive pas à faire le deuil de Charles parce qu’il ressent encore beaucoup trop de culpabilité. J’oublie mes préoccupations en lien avec Aiden. J’oublie que je suis une psychiatre qui commence à se faire un sérieux nom dans le domaine. J’oublie même que je suis une d’Egerton, une aristocrate anglaise. Ce soir, je ne suis que Clara. Une jeune femme de 27 ans qui s’amuse avec ses copines, qui boit sans se soucier des conséquences. Et qu’est-ce que ça fait du bien pour une fois !

Ça doit bien faire une bonne heure qu’on danse sur le dancefloor avec les filles, mais une terrible soiffe me pousse à arrêter pour aller me désaltérer. Je tente comme je peux de me faufiler au travers de cette marre de personnes costumées pour me rendre jusqu’au bar. Ce n’est pas super évident, surtout avec le plancher qui tangue comme sur un bateau et mes ailes de démone qui s’accrochent aux épaules de chaque personne, mais je finis par arriver à ma destination. Je commande un verre d’eau et n’importe quoi à base de vodka. J’adore la vodka ! Mon verre d’eau en main, je me tasse d’un pas vers la gauche par manque d’équilibre et je tombe contre une épaule. Après avoir lancer un regard qui se veut noir à la personne qui est en cause de ce manque d’équilibre, je me tourne vers la personne qui m’a sauvé une chute.

- Merci à ton épaule de m’avoir retenu sinon je me serais retrouvé le cul à terre et il est très loin d’être propre le sol. Beurk.

C’est officiel, je suis très loin de la Docteur d’Egerton, la psychiatre du Lennox Hill Hospital. Je suis une simple fille à la limite d’être complètement bourré dans un bar le soir d’halloween. Mais, pas une fille facile pour autant. C’est bien pour ça que je repousse les mains du gars de sur mes hanches.

- Lâches moi. J’veux pas que tu me touches.

Autant mes paroles que mes gestes ne semblent pas le convaincre de me laisser tranquille.

- Oh ! Aller. Tu vas me faire croire que tu t’habilles sexy comme ça juste pour le fun et pas pour aguicher les mecs p’tite allumeuse.

- T’es dégueulasse… lâches moi !

Je dis en tentant de le repousser, mais je trébuche en même temps. Mon verre d’eau se renverse et s’éclate sur le sol en même temps que des images de l’agression que j’ai subit l’année passée se superpose à ce qui se passe présentement. Je sens la panique prendre possession de moi. J’arrive de moins en moins à respirer. Je pleure silencieusement. Je cherche quelque chose à quoi me rapprocher, mais il n’y a rien. Que des inconnus. Mes amies ne savent pas ce qui se passent parce qu’elles continuent à danser. J’ai peur. Je panique.

costume de Clara

@Dallas Davenport

Une soirée d’Halloween, pourquoi est-ce que je suis là ? J’avais dis que je ne ferais plus ça. Il y a longtemps qu’aucune fête ne m’amuse plus vraiment. Je suis enfoncé dans ma souffrance depuis bien trop longtemps, mais un de mes amis m’a plus ou moins trainé là et c’est même lui qui m’a déguisé en roi Arthur, vous connaissez la légende du roi Arthur ? Excalibur tout ça ? Il sait que j’aime ce genre d’histoire et il m’a dégotté une longue cape, une fausse épée et une perruque. Je me suis regardé dans le miroir il a décrété que ça m’allait bien, qu’il ne manquait plus qu’un sourire. Je lui ai lancé un regard noir. Il a ris et lui s’est déguisé en zombie, il sait que je ne suis pas adepte des déguisement, il a fait simple pour le mien. On est allé donc à cette soirée. Il m’a dit qu’il y avait beaucoup d’étudiantes là-bas, que c’était pour ça qu’il m’y emmenait, super, je suis un peu plus vieux que lui il ne s’est pas dis une seconde que ça ne m’intéressait plus ?

On se rend pourtant jusque là et en effet je remarque qu’il y a beaucoup de jeunes, même si il y a quelques personnes de mon âge. Tout le monde à joué le jeu, je me sens donc un peu moins ridicule avec cette cape médiévale. Mon ami me lâche au bout de quelques minutes je le savais qu’il le ferait, mais je ne veux pas qu’il rentre seul, il boit et souvent il ne sait plus ce qu’il fait. Je bois aussi, mais en général je me souviens de ce que je fais, même si je bois beaucoup. Je soupire agacé, qu’est-ce que je fou la bon sang ? Je regarde une scène assez dérangeante depuis quelques instant, une demoiselle qui se fait mettre une main au fesses par un type qui se croit tout permis. Je secoue la tête et soupire, je bois le reste de mon verre et je vais vers les deux jeunes gens, visiblement le mec ne veut pas en démordre. Je ne sais pas pourquoi et je viens frapper le type avec mon poing avant de lui dire :

« Laisse ma copine tranquille. »

Je le laisse s’en aller en râlant, il voulait répliquer mais ses potes l’en ont empêché, je me penche vers la demoiselle et fronce les sourcils. J’ai l’impression de l’avoir déjà vu quelque part. Je m’accroupi et lui tends la main. Oui c’est bien elle qui m’avait aidé quand j’ai fait ma crise d’angoisse et j’ai l’impression qu’elle en fait une. Je la regarde dans les yeux et lui dit :

« Je sais que ce n’est pas beau de mentir, mais il ne voulait pas s’en aller, vous vous souvenez de moi ? »

Je retire ma perruque, peut-être que ça sera mieux et je lui dis :

« On va sortir d’ici si ça vous va. »

J’espère qu’elle en est capable, sinon je devrais la porter, mais peu importe, je ne vais pas la laisser comme ça.

Je panique. J’arrive plus à respirer correctement. Et je m’en veux. Je sais comment gérer une crise de panique alors pourquoi je n’arrive pas à mettre en pratique les astuces que je donne à mes patients ? Pourquoi je n’arrive pas à me concentrer sur quoique ce soit d’autre que sur les flashbacks qui me reviennent ? Et sur les images de Xavier dans son lit d’hôpital où j’ai dû le laisser lorsque le médecin a dit qu’il était temps de le laisser partir. Pourquoi une simple situation comme ça me met dans tout mes états ? Pourquoi il faut que je fasse une crise de panique en plein milieu d’un bar rempli de personnes le soir d’halloween sans être capable de reprendre le contrôle de moi-même ?

Puis, je vois une main se tendre devant moi me faisant sursauter. Je relève mon regard brouiller de larmes vers le propriétaire de cette main. Je connais cet homme ? Pourquoi il me parle de mentir ? Puis, je le reconnais lorsqu’il retire sa perruque. C’est l’homme de l’hôpital. Celui que j’ai aidé. Je regarde à nouveau sa main et pose la mienne dans la sienne en hochant la tête. Oui, sortir d’ici, c’est une très bonne idée.

- Je… Il est où le connard ?

J’arrive à demander d’une petite voix puisque, bien que je ne sois plus totalement prise dans mes souvenirs, j’ai toujours extrêmement de la difficulté à respirer et je pleure toujours par sanglot. Maudite crise de panique ! C’est horrible à vivre ! Je tente de me redresser avec son aide, mais je perds l’équilibre et tombe contre lui. Je m’agrippe encore plus à sa main, mais aussi à sa cape. Je ferme le yeux, contre lui, alors que des vertiges me prennent tout comme un léger haut le cœur. J’ai vraiment trop bu, c’est atroce. À moins que ce soit le contre coup des émotions qui me font me sentir si mal… Ça pourrait être logique. Ou encore plus logique : un mélange entre les deux.

Elle ne m’a sans doute pas reconnu tout de suite. Je peux comprendre. C’est la soirée d’Halloween, on est déguisé et j’ai une perruque, que j’enlève pour lui montrer qu’on s’est déjà vu. Ça me fait de la peine de la voir toute perdue à cause de ce genre de types. Elle finit par mettre sa main dans la mienne et je l’emmène près de la sortie et la regarde avant de répondre :

« Il est parti, je lui ai dit qu’on était ensemble et il a bien vu que j’étais près à lui en coller une, ses potes l’ont dissuadé de répliquer, ils sont intelligents au moins eux. »

Ils ont dû sentir que vu mon gabarit et vu la poigne que j’ai eu leur pote n’aurait sans doute pas été épargné. Je n’ai pas pour habitude d’être violent, quoi que … Je l’ai été en étant à l’armée, bien sûr, quand on dire sur quelqu’un c’est de la violence, ni plus ni moins, j’évitais quand je le pouvais, mais je n’avais pas forcément le choix. On était là pour ça … du moins je croyais qu’on devait aidé les gens, je me suis beaucoup trompé sur l’armée, on pense qu’on le fait pour notre pays, mais c’est bien plus complexe que ça.

J’emmène Clara dehors et elle devrait se sentir un peu mieux, même si ça ne fait pas tout. Je sais de quoi que je parle. J’en ai encore des crises alors je sais ce que ça fait et je me demande pourquoi elle en fait. Je crois avoir ma petite idée sur la question et j’espère me tromper.

« Est-ce que tu veux quelque chose ? De l’eau ? Qu’on s’en aille d’ici ? Tu n’as pas froid ? »

Il ne fait pas si froid que ça, mais il fait nuit et la température est toujours plus fraiche la nuit.

Je tente de me concentrer sur cet homme pour me recentrer dans le moment présent. Repousser les souvenirs de cette funeste nuit en me concentrant sur ce dernier, c’est tout ce que j’arrive à trouver pour m’aider à m’ancrer dans l’instant à cause de mon esprit trop noyer dans l’alcool. Je tente de calquer ma respiration sur la sienne tout en tentant de me concentrer sur ce qu’il me dit. Ça m’aide à repousser les cris de désespoirs qui vibrent dans mes oreilles bien que ça fait presque deux ans qu’ils ont été poussés dans la réalité. Je le suis jusqu’à la sortie bien agripper à sa main et à sa cape. Je ne suis pas encore trop en confiance vis-à-vis de mon cœur pour supporter mon poids.

- Merci d’avoir pris ma défense. De m’avoir sauvé. Je n’ose pas imaginer ce qu’il aurait fait si tu n’avais pas été là…

Au moins, cette fois, je n’avais pas causé la mort de quelqu’un parce qu’il a voulu me protéger. Cette pensée me donne encore envie de pleurer, mais je me retiens. C’est surtout la fraîcheur de l’intérieur qui me fait me ressaisir. Je ne dirais pas que j’ai complètement désaouler grâce à elle, mais au moins ça a eu le don de finir de me sortir de ma torpeur et de me reconnecter totalement avec le moment présent. Je fais quelques pas et m’appuie contre le mur. Il y a encore quelques mois, j’aurais voulu me faire une rail pour me remettre de cette situation, mais je suis clean. Et je n’ai pas envie de replongé. Pas après la mort de mon frère à cause de ça ni après avoir vu dans quel état se retrouve mon autre frère à cause de la mort de Charles. Je ne pouvais pas lui dire d’arrêter de se noyer dans l’alcool si je faisais des rails dans son dos. Cependant, je prendrais bien une cigarette. Mais je n’en ai pas. Tant pis. Je vais tenter de faire sans tout ça. Je me passe les mains sur mon visage en poussant un lourd soupire. Tant pis pour le maquillage. Aux paroles de l’homme, je relève le regard vers lui et je hoche la tête.

- Oui je veux partir, mais je veux pas te forcer à couper court ta soirée. Je vais prendre un taxi et rentrer, ça devrait aller… Je… je dois juste récupérer mes choses au vestiaire…

Je tente de me redresser et j’ai un haut le cœur que j'arrive à contrôler. J'ai vraiment pas envie de perdre le contrôle en vomissant. Puis, j’ai juste envie de pleurer. Encore. Je veux partir d’ici. Pourtant, je n’arrive pas à bouger, la tête appuyer contre le mur de brique tandis que je tente de retrouver mon souffle après ça.

Je la regarde, je m’inquiète pour elle, je n’aime pas la voir dans cet état-là. Je me demande ce qui ne va pas pour qu’elle ait eu autant envie … d’oublier ? Est-ce qu’elle boit pour la même raison que moi ? Pour oublier ? Ou pour autre chose. Je l’ai emmené dehors, prendre l’air fait toujours du bien, je ne sais pas vraiment pourquoi d’ailleurs, c’est un peu bizarre tout ça. Je préfère ne rien dire sur la fin de sa phrase, je ne veux pas imaginer non plus.

« Il n’y a pas de quoi, c’est un peu mon métier de protéger les autres … »

Je lui fais un sourire, oui c’est bien pour ça que j’aime ce que je fais. J’aurais pu faire beaucoup d’autres choses que militaire finalement, je m’en rends compte en disant ça. Il y a des tas de métiers qui sont fait pour ça et je me demande pourquoi je n’ai jamais pensé à postuler dans la police, tiens ça serait une idée ça. Je la laisse prendre appui sur le mur, je ne voudrais pas trop l’embêter, mais je n’ai pas envie de la laisser seule non plus. Elle n’a pas réellement toute sa tête, je ne voudrais pas qu’il lui arrive quoi que se soit. Pour une fois que ce n’est pas moi qui suis ivre et que je n’ai pas une crise de panique. Je suis « normal » disons, c’est plutôt rare.

« Je peux te servir de chauffeur si tu veux, j’ai ma voiture et je n’avais pas prévu de sortir au départ, ce sont des copains qui m’ont proposé et ils sont déjà bien occupés, ça ne les dérangera pas si je m’en vais. »

Oui ils sont bien occupés, puis ils comprendront, ils penseront surement d’autres choses, mais ça m’est égale, je veux m’assurer que tout va bien pour elle, jusqu’au ce qu’elle soit en sécurité.

« On peut aller les récupérer, passe devant, je suis derrière, »

Je ne veux pas qu’elle se perde ou qu’elle fasse d’autre mauvaise rencontre, c’est peut-être un peu direct et peut-être que je prends mon rôle bien trop à cœur, mais c’est ce que je sais faire de mieux finalement.

Appuyée contre le mur extérieur du bar, je lui offre un sourire à mon tour. Je ne lui dirais pas puisqu’on ne se connait pas, mais il n’a pas idée d’à quel point pour moi c’est énorme. Il n’a pas juste fait partir un gars trop lourd, il m’a évité de faire une crise assez intense et de replonger à cause de tout ça. Je le verrais tellement être policier et s’assurer que les enfants gardent un bon souvenir de leur rencontre. Ou encore infirmier, à s’assurer que chaque patient soit bien à chacune de ses visites. Je me demande pourquoi il a choisi d’être militaire.

- Tu fais quoi maintenant ?

Je veux arrêter de penser à cette homme qui était prêt à… à me faire ça et à ce qui s’est passé il y a presque un an avec Xavier. Ça fait trop mal. Et je n’ai pas envie de perdre encore le contrôle sur mes esprits. Je suis contente de voir qu’il ne semble pas vouloir me laisser seule. Je me sens bien avec lui. Je me sens en sécurité à ses côtés. Au milieu de mon esprit ramolli à cause de l’alcool, je réalise que je ne peux pas rentrer à l’appartement dans cet état ! Je n’arrête pas de prendre la tête à Clay parce qu’il boit jusqu’à se mettre dans cet état minable ! J’étais supposée aller dormir chez une amie. Et voilà que je me mets à pleurer à nouveau. Je me trouve tellement pathétique !

- Je peux pas rentrer chez moi dans cet état, je devais aller chez une amie. Et tu es avec tes amis. Je suis tellement minable et pathétique..!

Je tente de reprendre le contrôle de moi-même en essuyant les larmes sur mes joues, rapidement remplacer par d’autres. J’en ai marre. Je veux juste prendre une pause de ma vie. Arrêter de toujours viser plus que la perfection. Je veux juste enlever toute cette pression que mon nom de famille met sur mes épaules. Et même ça je n’arrive pas à le faire correctement ! Je suis vraiment minable. C’est finalement un haut le cœur qui arrive à arrêter mes larmes. J’essuie à nouveau mes joues et hoche la tête à ses paroles. Je serais bien tentée de prendre sa main pour être sur qu’il ne me laisse pas seule, ce qui se voit par ma main que je tends vers lui pendant une fraction de seconde avant de me reprendre. À la place, je marche jusqu’à l’entrée du bar, d’un pas incertain, puis une fois à l’accueil, je donne le papier – que j’avais glissé dans la poche de mon short – pour récupérer mes choses. J’enfile mon manteau en fausse fourrure noire, puis je prends mon sac. Je me tourne vers mon inconnu et lui fait un faible sourire.

- J’ai tout…, lui dis-je simplement pour lui signifier qu’on peut quitter ce bar maudit maintenant. Je ne dois ressembler à rien en plus avec mon maquillage qui a coulé à cause de mes larmes.

Je ne sais pas tellement pourquoi je lui ai parlé de ça, du fait que j’étais militaire, même si elle le savait déjà, on s’est déjà croisé avant, quand je faisais une crise de panique au beau milieu de l’hôpital, c’est un peu mon lot quotidien, mais je crois qu’elle comprend, bien mieux que je ne l’imagine visiblement.

« Je suis garde du corps, pour des enfants de « célébrités » … j’ai l’impression d’être plutôt un babysitter qu’autre chose … »

Clairement ça ne me plait pas beaucoup, pour le moment, mais ce n’est que le début et puis j’ai été garde du corps pour d’autre célébrité, ça n’a pas été de tout repos, c’est bien plus qu’un simple job, il faut être présent tous les jours et ça me fait dire que je ne suis pas près d’avoir des enfants. Je comprends qu’elle soit embarrassée de rentrer chez elle et sans vraiment savoir pourquoi je lui dis :

« On peut aussi aller chez moi … si tu es d’accord, j’ai une chambre d’ami qui ne sert jamais, ça sera l’occasion … et au moins je serais sûr que tu seras à l’abri. »

Pourtant elle serait loin d’être en sécurité avec moi, je le sais tout au fond de moi que je suis parfois … disons que j’ai des réactions que tout le monde n’a pas, surtout en pleine crise, mais tout ira bien. Je la regarde et ajoute :

« Et tu n’es pas minable, ça arrive à tout le monde de vouloir se vider la tête … plus qu’on ne le pense, crois-moi, tu es loin d’être minable. »

Elle est loin de l’être, elle ne fait pas ça tous les jours, j’en suis sûr, je le fais souvent, bien plus qu’elle j’imagine, mais je sais que ça n’apporte pas grand-chose mis à part de se sentir encore plus mal. Elle revient vers moi après avoir été chercher ses affaires et me dit qu’elle à tout, alors j’envoie un texto à mes amis pour leur dire que je pars.

« Alors allons-y, j’habite à staten island, mais j’ai ma voiture. »

Je la laisse passer devant, je ne voudrais pas que quelqu’un l’empêche de partir. Je n’ai jamais aimé les fêtes d’halloween, j’ai l’air ridicule maintenant avec ma perruque dans les mains, ma cape de chevalier … non vraiment, mais le ridicule ne tue pas heureusement. Je lui passe d’ailleurs ma cape quand on est dehors et lui dit :

« Si tu as froid, tu peux la garder. »

Je ne veux pas qu’elle soit malade en plus d’avoir la gueule de bois. Je lui montre la voiture et lui ouvre la porte. Je ne sais toujours pas si c’est une bonne idée ou non, mais peu importe.

J’apprécie vraiment le fait qu’il me parle de lui. Je sors réellement de ma torpeur de cette façon. J’arrive à me sentir à nouveau en sécurité et ça calme l’anxiété qui coulait dans mes veines ainsi que les mauvais souvenirs du début de l’année. Un petit sourire se dessine sur mes lèvres à sa réponse. Ça explique tout.

- J’aurais dû m’en douter. On ressent très bien le garde du corps en toi, même si tu as l’impression de babysitter. Ils sont aussi capricieux qu’on se l’imagine ?

Je comprends maintenant pourquoi je me sens aussi en sécurité à ses côtés. Son métier est d’assurer la sécurité des autres. C’est presque excitant en fait… Bref, je tente de le faire parler encore un peu pour finir de me sortir de cette torpeur et aussi par curiosité. J’ai côtoyé plusieurs personnes célèbres, certes, mais entre les aristocrates anglais et les célébrités américaine, il y a deux mondes ! Alors je suis curieuse de savoir si elles sont comme les magazines les décrivent.

Je suis surprise lorsqu’il me propose d’aller chez lui. Je ne m’attendais pas à ce qu’il me fasse cette proposition. Et encore moins qu’il rajoute que comme ça il sera sûr que je suis à l’abri, ce qui me fait doucement rougir en baissant les yeux et me mordillant la lèvre. Je finis par secouer la tête à ses paroles. Si seulement il savait !

- Je le suis parce que je reproche à mon frère de faire la même chose… C’est pour ça que je ne peux pas rentrer chez moi dans cet état… Alors, oui, je serais bien contente de faire en sorte que ta chambre d’ami serve pour une fois.

Je finis de parler avec une voix un peu plus douce alors que le rouge revient sur mes joues. J’ai envie de l’embrasser… est-ce mal ? J’aurais envie de me plonger entre ses bras et de ne plus y bouger pendant des jours. Mais, c’est complètement insensé. On ne se connait même pas réellement. La première fois qu’on s’est rencontré, il faisait une crise de panique à l’hôpital. Et, cette nuit, c’est moi qui en faisais une. Alors on ne peut pas dire qu’on se connait, même si on s’est rencontré toujours dans nos moments les plus vulnérables. Je me contente de récupérer mes choses au vestiaire avant de retourner au côté de mon inconnu. Je suis soulagée lorsqu’il me dit qu’il a sa voiture. Je ne me serais pas vu faire le chemin jusqu’à chez lui en métro. J’aurais eu trop peur de faire une nouvelle crise de panique. Alors je le suis en hochant la tête ou plutôt je marche devant lui en lui jetant des regards pour m’assurer qu’il me suit bien. Je ne voudrais pas me retrouver seule en plein milieu de la ville dans la nuit. Quoique… je ne connais pas mon inconnu alors… est-ce vraiment sécuritaire de le suivre chez lui ? J’ai confiance en mon instinct, il ne m’a jamais trompé alors je peux avoir confiance en lui. Je sursaute presque lorsque je le sens déposer sa cape sur mes épaules. Tout de suite, je viens bien la serrer autour de moi avant de le regarder.

- Merci. Mais toi, tu n’auras pas froid? J’ai mon manteau déjà.

Après ce que le gars du bar m’a dit, ça me rassure de me retrouver entourer par cette longue cape qui traine presque au sol. Et en plus, je me retrouve entourer par l’odeur de mon inconnu. Ça faisait longtemps que je ne m’étais pas retrouver entourer par l’odeur d’un homme comme ça. Ça fait déjà des mois que les vêtements de Xavier ne portent plus son odeur et ceux de Charles commencent doucement à perdre son odeur. Cette constatation me brise le cœur. Je le remercie lorsqu’il m’ouvre la porte avec un petit sourire amusé. Est-ce de la galanterie ou une déformation professionnelle venant de son poste de garde du corps ? Je le regarde faire le tour de la voiture et, une fois qui est installé à côté de moi, je lui tends la main.

- Au fait, je m’appelle Clara.

Je me présente enfin avec un doux sourire légèrement timide, ce qui m’arrive pratiquement jamais.

J’ai un sourire quand elle me dit qu’elle aurait du deviné, qu’on ressent bien mon côté protecteur. Je crois que c’est aussi mon côté militaire qui ressort. Je ne pourrais jamais faire semblant d’avoir été quelqu’un d’autre, ça fait parti de moi et j’aimais ce que je faisais, mais me retrouver mis sur la touche de cette façon .. je ne leur pardonnerai jamais. Ils ont fait de moi un moins que rien en me laissant tomber et j’ai du mal à me remettre. Je lui réponds :

« Oh c’est sans doute parce que tu sais aussi que j’étais militaire, ça faisait parti du job de s’occuper des autres, c’était du moins une partie qu’on voit moins, mais ça me plaisait, je ne savais pas quoi faire d’autres après … »

Je fais une pause, je n’ai jamais vraiment dit comment j’avais quitté l’armée et je n’ai pas envie de parler de ça. Je hausse les épaules et préfère répondre à son autre question et lui dit :

« Ca dépends de beaucoup de chose, ce qui m’inquiète c’est surtout le fait qu’ils soient souvent très seul et que leur parents ne sont pas vraiment là. »

Ça me fait de la peine pour eux, tout le monde a besoin d’avoir des parents, même des enfants qui ont tout en surface. Je l’entraîne vers la sortie, lui laisse ma cape pour ne pas qu’elle ait froid et je reste sans savoir quoi dire quand elle me parle de son frère et je lui réponds :

« Je suis désolé pour lui, j’espère qu’il s’en sortira. Mais tu es toi et tu n’es pas comme ton frère, tu n’as pas besoin de prouver quoi que ce soit … »

Je dis ça, mais bien sur je ne sais pas du tout de quoi il en retourne, je ne connais pas sa vie, mais je sais que chaque personne est unique. Quoi qu’il en soit je suis ravi qu’elle soit d’accord pour venir chez moi et je ne sais pas tellement pourquoi je le suis tant, peut-être parce que ça fait longtemps que je me sens seul et qu’elle est la première a venir … je ne sais pas trop. Mais je crois qu’il y a autre chose, que je ne veux pas admettre.

« Ne t’en fais pas, j’ai un costume qui tient chaud. »

Je lui fais un sourire, j’ai l’air ridicule hein ? Je souris de nouveau quand elle me dit qu’elle s’appelle Clara et je lui avoue :

« Je sais … Tu avais ton nom sur ton uniforme à l’hôpital … »

Est-ce qu’elle ne le prendra pas mal que je l’ai retenu ou que j’ai regardé ? J’espère que non et je j’ajoute même si il me semblait que je lui avais dit, mais je ne me rappelle plus et lui dit :


« Dallas ... »

Je m’attends à ce qu’elle fasse une réflexion sur mon prénom qui est bien sur celui d’une certaine série télévisé, mais pas que, ce n’est pas à cause de ça que je m’appelle comme ça. Je ne sais même pas pourquoi en réalité. Je la laisse monter côté passager et me pose à l’avant en fermant la porte. Je mets le contact et démarre.

« Ce n’est pas vraiment tout près, mais pas loin non plus, je peux mettre un peu de chauffage si tu veux. »

Il ne fait pas très chaud même à l’intérieur.