Les courses étaient toujours une corvée pour moi, je ne sais pas vraiment pourquoi mais je n’avais jamais vraiment appréciée de me retrouver dans des allées blindés. En fait, la foule me dérangeait, ce qui était plutôt surprenant moi qui avait l’habitude de me retrouver dans une classe entourée d’une bonne vingtaine d’enfants. Mais c’était bien là la différence, on parlait d’enfants, pas d’adultes comme ici. Avant j’avais prit l’habitude de venir pendant les heures les plus calmes, donc tard le soir. Mais avec Astrée, ce n’était plus possible. Alors je prenais sur moi et tentait de faire au plus vite. Astrée était en général assez calme et restait près de moi. Mais elle pouvait avoir ses humeurs et quand madame avait une chose en tête, il lui arrivait de filer pour allez chercher ce qu’elle désirait. Et elle venait de le faire, j’avais tourné la tête deux secondes et plus d’Astrée. Je ne paniquais pas de suite, en général, elle revenait très vite vers moi, avec son petit air penaud. Mais là, elle ne revenait pas et ça fini par m’inquiéter. Alors je commence à la chercher, sans laisser la peur m’envahir. J’imagine déjà le pire, son père. Je n’ai plus de nouvelles depuis des années, il ne sait rien de son existence, mais je me méfie. Il a tellement de pouvoir, il m’a fait tellement de mal. Je ne peux pas le mettre dans un coin de ma tête. Alors je sens le stress qui monte et je parcours les rayons. Pas de petite fille seule, la panique monte en moi. Et puis je vois une petite blonde, main dans la main d’une femme qui me dit vraiment quelques chose. Je reste un instant immobile alors que l’enfant elle lève la tête. C’est Astrée aucun doute. Elle réalise face à moi qu’elle ne tient pas ma main. Elle retire sa main et avant que j’ai pu faire quoi que ce soit, elle fond en larme et hurle « Maman » Je me réveille aussitôt de ma surprise et je me précipite vers ma petite fille. Je la soulève et embrasse son front avant de planter mon regard dans celui de l’inconnu. Pas une inconnue en fait. Je la connais plus que n’importe qui au monde. Je tremble face à ma jumelle, me mord la lèvre avant de déclarer « Désolé, bonne journée madame » Elle m’a reconnu, c’est certain, malgré mes mèches rose et le maquillage que je ne mettais jamais avant.

Perdre ma fille de vue réveille en moi une vraie panique. De suite j'imagine le pire. Et s'il était là. Je sais bien que les risques sont faible, voir même inexistant. Mais il m'avait tant pourri la vie, fait du mal, que je ne pouvais pas ne pas penser à lui. S'il m'avait retrouvé, découvert son existence à elle. Je ne pouvais pas laisser ça se faire. J'étais peut être un peu parano, mais c'était ce que ma vie avec lui m'avait laissé. J'essayais de faire ma vie au mieux loin de lui. Mais il restait toujours dans un coin de ma tête, je savais que je ne pourrais jamais oublier. Mais heureusement ma fille n'est pas loin. Elle est avec une femme. Je suis surprise de la voir avec une personne qu'elle ne connait pas, mais je suis soulagée. Il n'est pas là. Du moins pas encore. Astrée finit par se rendre compte de sa méprisse. Elle lâche la main de l'inconnue et me court dans les bras. Je la presse contre moi avant de réaliser qui elle tenait par la main. Ma jumelle, ma copie, voilà pourquoi elle a confondu. Je me tend, je ne m'attendais pas à la trouver là. Surtout, je sais qu'elle me reconnait, comme je viens de le faire. C'était évident qu'elle allait remettre mon visage, elle me connait par cœur. Je m'excuse, voulant partir. J'en suis pourtant incapable, encore plus quand elle prononce mon prénom, mon ancien prénom. Je vois le regard de ma fille, elle se demande qui est cette inconnue, pourquoi elle m'appelle d'un prénom qu'elle ne me connait pas. Je la dépose doucement dans mon caddie. Puis je me tourne vers Juliet, je secoue doucement la tête avant de lui répondre « Je m'appelle Julyne, vous devez confondre, je suis désolé » Tout en disant ça, mon regard glisse vers la poussette, je remarque une petite fille dans celle ci. Un pincement au cœur me prend, ma sœur est devenu maman, je ne le sais pas. Tout comme elle même ne sait pas ce qu'il s'est passé dans ma vie. Alors je rajoute tout de même « Votre fille est vraiment belle » Oui et j'aimerais pouvoir la connaitre, tout comme retrouver ma soeur. Mais je ne veux pas la mettre en danger, je ne veux pas qu'il puisse nous retrouver. Je dois garder ma nouvelle identité. Je ne suis plus June, je suis Julyne et Julyne n'as pas de jumelle.

Je suis face à ma sœur et je me sens piégée, elle me connais, presque plus que moi même. J'essaye pourtant de me faire passer pour une autre. Evidemment, elle ne me croit pas, elle utilise de nouveau mon ancien prénom avant de me dire que peu importe mes cheveux je suis bien Joyce. Je secoue la tête avant de lui répondre doucement « Je ne suis pas Joyce, je suis Julyne » Bon, la phrase exacte serait, je ne suis plus Joyce. Mais elle ne peut pas comprendre, elle n'as pas tout suivit, elle ne sait pas qui était vraiment Adam, elle ne l'as pas rencontré souvent mais à chaque fois il était l'homme idéal. Je n'ai jamais eu la force d'allez la voir, de lui avouer ce qu'il me faisait subir, j'avais honte, j'ai toujours honte. Je ne peux pas lui dire maintenant, je n'en aurais jamais la force. J'ai su partir, pour Astrée, mais j'ai toujours aussi honte d'avoir été manipulé de la sorte par un tel connard. Je regarde la petite fille de ma sœur, elle est adorable, je lui en fait la remarque même si je sais que ça peut être bizarre de la part d'une personne inconnue. Mais de toute façon, elle sait, je ne suis pas une inconnue. Elle me remercie et me retourne le compliment, je caresse doucement la joue de ma fille et embrasse son front, c'est vrai. Ma fille est magnifique et surtout, merci, elle ne ressemble en rien à son père. Elle n'as pas une seule chose qui peut me le rappeler, c'était une de mes peurs. De voir cet enfant ressembler à mon bourreau et me mettre sous le nez chaque jour ce passé sombre que je voulais oublier. Ma soeur me rappelle Joyce, avant de me dire qu'elle a besoin de réponse. Je ne répond pas, je secoue la tête, je ne peux pas. Je ne veux pas non plus, car c'est un risque, pour elle, pour moi. Je la fixe avant de murmurer « Au revoir Juliet, prend soin de toi » Oui, j'avoue par cette phrase que je suis bien Joyce, mais elle n'avais pas besoin de mes aveux, elle le sait depuis qu'on s'est revu. Je passe à côté d'elle pour continuer mes courses, nos mains se frôlent. Ce simple contact me fige, depuis combien de temps je n'ai pas prit ma sœur contre moi ? Je me rend compte a cet instant combien ça me manque.

Evidemment elle n'est pas convaincue, elle me dit d'arrêter de lui dire n'importe quoi, elle veut des explications. Mais je ne peux pas lui en donner, je ne veux pas. Alors je ne lui répond pas. Je la salut, utilisant son prénom, me cramant au passage mais peu importe. Je ne l'ai jamais leuré, elle sait qui je suis. Mais j'essaye de rester calme. Je vais quitter le magasin et croiser les doigts pour qu'on ne se recroise pas. Pas que je n'aimerais pas la revoir, mais c'est mieux ainsi pour tout le monde, pour ma sécurité, celle d'Astrée et aussi celle de Juliet. Il pourrait s'en prendre à elle, j'en suis certaine, il est tellement fou. Je vais la dépasser quand on se frôle involontairement. Ce qui me fige. Sentir la chaleur de sa peau, retrouver son odeur dans mes narines. Elle m'a manqué. Le vide que je ressent depuis des années se comble comme par magie. Je me retrouve incapable d'avancer de nouveau. Je déglutit, tente de marcher de nouveau. Mais elle prend mon bras et d'un coup une larme coule sur ma joue. Je ne peux pas partir, je veux la prendre dans mes bras. J'adorerais qu'elle revienne dans ma vie. Mais non. Hors de question de la mettre en danger. Alors malgré ses suppliques, je ne dirais rien. Mais je peux quand même la prendre dans mes bras. Je ne résiste plus, je viens me blottir contre elle. Je ferme les yeux, savourant ce moment. Je sais qu'il seras unique. Je ne veux pas qu'on puisse nous retrouve. S'il trouve sa trace, il risquerait de faire le lien avec moi et il ne faut pas qu'il puisse le faire et pour ça il vaut mieux que Juliet en sache le moins possible. Je déteste ce fait, mais c'est tout ce que je peux faire pour me protéger. Et surtout pour protéger ma fille Mon regard se pose sur Astrée et mon coeur qui était prêt a flancher se ressaisit. J'aime Juliet, c'est ma jumelle, ma moitié, mais Astrée est ma chair et mon choix est fait. C'est l'un des pires choix que je n'aurais jamais à faire, mais je n'ai pas le choix. Je dois protéger ma fille, mon bébé. Alors je me blottie un peu plus fort contre ma soeur et murmure dans son oreille « Je ne peux pas. Joyce est morte, à présent, je suis Julyne. Tu ne dois pas essayer de me retrouver. Je suis désolé Ju' » Et je quitte ses bras, plantant un regard triste dans le sien. Mais je suis sérieuse, je veux qu'elle le comprenne. C'est douloureux, mais c'est le mieux à faire pour tout le monde. Elle vas m'en vouloir, je le sais. C'est une déchirure pour moi, pour elle, je le sais. Mais c'est nécessaire. Pour ne pas qu'il me retrouve. Je ne veux pas qu'il me prenne ma fille, qu'il puisse lui faire du mal. Alors je recule de ma soeur pour ne pas revenir sur ma décision.

J'ai craqué, je n'aurais pas du, mais je la prend dans mes bras. Car ma sœur m'a manqué, si fort. J'aimerais tant pouvoir renouer avec elle, la voir tout les jours, lui envoyer des messages et lui raconter tout ce qu'il se passe dans ma vie. Savoir aussi ce qu'il s'est passé dans la sienne, qui est sa fille, qui est le père de cette beauté, comment elle vas, ce qu'elle devient. Tout ce que je devrais savoir d'elle. Avant on se disait tout, absolument tout. J'aimerais tant retrouver cette complicité. Mais je ne peux pas, car je ne veux pas la mettre en danger. Je l'aime, tellement fort. Je ne veux pas qu'il la retrouve, qu'il lui fasse du mal. A l'époque, il m'avait coupé de tout, il m'avait empêché de revenir vers ma famille alors il ne connaissait pas l'existence de ma jumelle. Je ne voulais pas qu'il puisse l'apprendre, ou qu'il puisse me retrouver par son biais. Doucement, je me détache de ma sœur, je ne peux pas rester longtemps contre elle. Je risquerais de craquer et je ne dois pas le faire. C'est trop dangereux. Je m'écarte donc d'elle et puis je lui redit mon prénom, précisant qu'elle n'est plus celle qu'elle a connu, qu'elle ne doit pas me chercher. Il ne faut plus qu'on ait de contact. Mais je connais bien ma sœur, je savais qu'elle n'allait pas laisser les choses se faire si aisément. Evidemment, elle me dit que ce n'est pas possible, qu'elle a besoin de moi, que je ne peux pas la laisser. Et ces mots me font du mal, tellement de mal. Je la fixe, les yeux au bord des larmes. Je la regarde, tellement désolé, je recule doucement. Et puis je murmure « Je suis désolé Juliet, si désolé, je ne voulais pas te faire du mal, je te protège, je la protège. Je ne veux pas qu'il te fasse du mal » Car oui je mourrais d'envie de revenir dans sa vie, mais c'était trop dangereux, je pourrais être amené à changer de ville de nouveau, du jour au lendemain s'il retrouvait ma piste. Si je partais, Juliet ne pourrais pas me suivre et ça recommencerait, elle ferait mieux de faire comme si elle ne m'avait pas vu.