Nuit animée en perspective. Les fêtes, Jesus les adoraient. Pour la peine, il avait convié une grande partie de son entourage “amical” en boite de nuit afin de s’oublier le temps d’un soir, sous les lumières des projecteurs et l’immense boule à facette de la boite de nuit. Il y avait déjà du monde en arrivant, mais on l’avait fait passer lui et sa petite troupe, certainement grâce à sa notoriété. On lui refusait rien à Jesus, et pourtant, il ne réclamait pas forcément quoique ce soit. Il avait ce chic pour convaincre les gens à le suivre, à être de son côté, à croire que c’était naturel. Il s’était pourtant déjà battu dans sa vie, mais même lorsqu’il perdait le combats, les gens l’appréciaient. Il avait finit par se faire un nom dans les rues de San Juan et même à New York il s’était construit une bonne réputation.
Et danser, il en avait besoin. Il avait l’impression d’être une nouvelle personne depuis sa dernière rupture, de se redécouvrir, tel un bourgeon qui fleurissait à nouveau après que l’hiver ait tué la fleur qu’il avait été autrefois. Mais il n’avait pas totalement perdu sa personnalité délurée, ce qui rassurait ses amis et amies, ou presque. Parfois, ça n’annonçait rien de bon. Jesus était un spécialiste pour pouvoir cacher une partie de ses émotions en se masquant le visage. Et il n’était pas totalement guéri, Jesus.

Le DJ passait des musiques délurées électriques et techno, un peu comme avant mais en version de nos jours. Les gens criaient, riaient, pleuraient… Les corps s’enflammaient, dansant au rythme de la musique. Jesus s’était ainsi approché d’une gazelle solitaire pour pouvoir se trémousser contre elle. Naturellement, son apparition ne lui déplut pas, après tout, il était LE styliste en vogue de ces dernières années. Son regard pétillant se fondait avec celui du bientôt trentenaire et il échangea même quelques baisers langoureux au passage… Sans aller plus loin. Non, Jesus n”était pas encore guéri, il n’avait pas le coeur à s’offrir à quelqu’un d’autre pour le moment, pas même pour s’amuser.
Après ses embrassades, il lâcha la demoiselle pour se diriger vers le bar et boire un coup. Un coup” ouais. A vrai dire, on lui en avait offerts plusieurs, des verres, et il se voyait mal les refuser. Quelques amis et amies l’avaient rejoint et il avait décidé de partager son buttin avec eux. Au bon d’un moment, l’alcool monta un peu trop à la tête et il avait attrapé une bouteille posées sur le comptoir qu’il avait éclaté sur son propre crâne dans l’effervescence de la soirée, alors qu’il atteignait à nouveau le milieu de la piste de danse. Il se figea ainsi le temps d’un instant, prêt à entrer en fou rire tandis que des filets de sang coulaient du haut de sa tête. “Heeey mais regardez, je saaaaigne” eut-il le temps d’exprimer de façon amusée avant de tomber dans les pommes. Un vrai cas désespéré! Alertes, ses proches se mirent à réclamer de l’aide….

Jesus, en soirée, avec le coeur brisé, ça n'annonçait jamais rien de bon. Remarque, c'était à peu près la première fois qu'il avait réellement le coeur brisé. Il avait déjà vécu des ruptures, certaines qu'il trouvait dommage, mais pas au point d'avoir le sentiment d'un poignard dans le coeur comme cela. C'était comme s'il allait jamais s'en remettre alors que... Il y avait bien d'autres choses à vivre qu'une pitre histoire d'amour. Pourtant, il l'avait bien sentie. Cela faisait si longtemps qu'il avait été amoureux d'elle qu'il s'était persuadé qu'elle avait été l'amour de sa vie. Tant pis, si ça se trouvait, il n'était fait pour personne. Parce que si ce n'était pas elle... ce serait qui? Il voyait personne. Enfin, son discours risquait d'être revu lorsqu'arrivera le moment où quelqu'un se présentera et lui refera vivre ces palpitations agréables dans le corps. Peut être avait-il besoin de ne juste plus y penser et d'accepter que ce soit terminé pour accepter l'idée d'une nouvelle histoire d'amour dans sa vie... Mais là, forcément, il était encore en plein dans ses émotions vives.

Alors qu'il s'amusait, que des tas de gens autour de lui riaient, chantaient, dansaient, ce fut le trou noir. Un peu comme dans les thrillers psychologiques où, pendant ce laps de temps où il était inconscient, il revivait un enfer dans son esprit. Mais, comme dans ces mêmes films, il entendait sa mère crier alors qu'il revenait à la maison après avoir été passé à tabac par le gang opposé au sien, son père lui dire qu'il reviendrait dans pas longtemps et surtout, le doux visage de sa belle sur le sable chaud de Floride. C'était comme un bouillon de souvenirs forts explosaient dans sa tête tel de pop corns tout chauds. Il se réveilla net, le coeur battant et prit d'angoisse, réalisa qu'il n'était plus dans la boite de nuit. Le médecin présent tenta de le rassurer, mais l'idée qu'il soit à présent à l'hôpital le fit encore plus angoisser. "Je vais revoir ma maman?" avait il demandé d'une voix de petit garçon de six ans. On prit sa tension et autre évaluations de santé, puis le médecin lui annonça qu'il allait revenir. L'espace d'un instant, il revivait le départ de son père, qui lui avait dit exactement la même chose mais en espagnol.
Quelqu'un entra ensuite dans sa chambre et vint le rejoindre en lui disant qu'il lui avait fait peur. Jesus arqua un sourcil alors qu'il le dévisageait. "Roger, c'est toi?" lui demanda t-il sans avoir même une seule idée de qui pouvait être le Roger en question. Sans doute quelqu'un qui ressemblait à cet homme et qu'il avait déjà croisé. Un collaborateur, fournisseur ou même un pote de loin.
"Désolé de t'avoir fait peur."
Il ne savait pas vraiment pourquoi il s'excusait à cet autoproclamé Roger mais il s'était dit qu'il fallait le faire. Il se surprenait lui même d'ailleurs, de ses réactions. A croire que le coup qu'il s'était pris à la tête avait endommagé pas mal de neurones et qu'il se mettait soudainement à réaliser ce qui l'entourait. Ou à l'inverse, à entrer dans une sorte de psychose qui lui faisait dire un peu n'importe quoi.