L'arrivée de Silas était plus que bienvenue. Il se serait bien satisfait de sa solitude, d'ailleurs, il s'était préparé à l'être pour le restant de la soirée mais l'homme s'était finalement présenté. Petite soirée sympa en perspective, sans prétention en tout cas, même si il ne savait pas vraiment comment ça allait se terminer. Ca pouvait rester ainsi jusqu'au matin ou bien l'un des deux allaient se lancer dans une folle aventure. Silas était un ami d'enfance, même un peu un ami de toujours quand on y pensait et Murphy le connaissait tellement par coeur qu'il n'avait pas eu la moindre hésitation sur son innocence, lorsque ce dernier a été envoyé en prison. Il a même son possible pour pouvoir le tirer d'affaire et apporter ses témoignages, bien qu'il ait pu se faire détester par une poignée de gens pour cela. On avait même essayé de le faire douter, parfois on croit connaître bien les gens et en fait, on se rend compte qu'ils nous cachent une partie de leur vie. Mais Murphy avait prit la décision de lui faire confiance jusqu'au bout. S'il y avait eu un truc, Silas le lui aurait dit, il en était certain.
Il éclata de rire au surnom affectif que ce dernier lui distribua tout en lui retournant la question, en anglais cette fois ci. "Niquel, un peu froid mais je me porte toujours bien moi tu sais!" assura l'infirmier qui l'invitait à prendre place à côté.
Son amusement s'accrût lorsqu'il rappela d'ailleurs qu'il lui avait été loyal jusqu'au bout et que cela méritait même "un câlin". Pour la peine, Murphy ouvrit les bras, histoire de concrétiser la chose : "Je suis le meilleur ami que tu ne pourras jamais avoir Silas Moretti, sache le" surenchérit-il en se lançant lui-même des fleurs, mais pour la bonne cause.
Puis il demanda à quoi ils allaient trinquer, étant donné qu'ils avaient tous les deux apportés un lourd moyen de boire. Silas suggéra de fêter la vie et lui apprit par la même occasion qu'il allait avoir sa fille à la maison. Murphy en fut enchanté et son expression se mit davantage à briller : "Sérieux? Oh mais c'est une super bonne nouvelle! Je suis très content pour toi Silas, tu vas pouvoir... être enfin un papa."
Il n'imaginait pas à quel point ça devait être difficile comme situation, à vivre et à gérer au quotidien. Il n'avait pas de mioche mais ça ne l'avait pas empêcher de se projeter dans le contexte, si c'était lui qui aurait été à la place de Silas. Murphy n'avait pas la fibre parentale, toutefois, les enfants étaient un point sensible pour lui. Il avait pu s'occuper de certains d'entre eux dans le cadre de son métier et il fallait avoir le cœur lourd pour encaisser tout ce qu'il avait pu entendre et faire face à des situations que l'on ne souhaitait à personne.

"Et comment ça va se passer? Est ce que... tu la verras souvent? Si jamais t'as besoin d'aide d'ailleurs..."
Il se ferait une joie de voir la descendance de son ami.

Ils étaient là, tous les deux, pour se retrouver un peu. Depuis la sortie de prison de Silas, ils en avaient pas eu l'occasion de nombreuses fois, étant donné leurs agendas respectifs chargés. Il était difficile de capter Murphy en dehors de son lieu de travail d'ailleurs, parce que soit il bossait, soit il dormait, en général. Son boulot était tellement prenant physiquement et moralement qu'il occupait son temps libre à récupérer. Mais il se forçait aussi à faire autre chose pour ne pas tomber sur une routine ennuyeuse, et surtout, pour ne pas sombrer dans la dépression. Des choses difficiles, il en voyait tous les jours. Il fallait pas qu'il perde le manche de son humeur, autrement, il pouvait vite dériver. Ca faisait partie du métier après tout, et dieu seul sait à quel point ce n'était pas évident.
Silas le rejoignit dans l'échange que Murphy avait invité à faire. Après tout, il avait vu qu'il en avait eu besoin.

"Bah de rien, je vois bien que t'es tracassé en ce moment! Et moi j'avais besoin... de me vider la tête un peu! J'aime bien être un peu comme ça, loin des gens, loin de la foule, me retrouver. Avec toi, bien sûr! Mais... pas dans un bar ou une boite branchée... tu vois ce que je veux dire?"

Parfois il n'était pas toujours facile de suivre Murphy. Il avait tellement de chose à penser, une quantité de charge mentale astronomique qu'il se perdait lui même par moment.
Silas avait enchainé sur le sujet de sa fille et Murphy en était ravi pour lui. Pour lui, si Silas n'avait pas récupérer la garde jusqu'à présent, c'était à cause de son passage en prison. Sauf que là, il n'y était plus, et en plus, il était innocent. Que demander de plus? Bien qu'il s'agissait là de la vie d'un enfant tout de même, mais les Etats Unis n'étaient plus à ça près concernant les droits de ces derniers. A en serrer le cœur d'ailleurs. Les gens pouvaient être de grosses ordures, et encore, le qualitatif était faible pour ce à quoi il pensait.

"A cause de ton père?" répéta Murphy comme s'il n'avait pas entendu alors qu'il avait très bien entendu. Mais il demandait par là de plus amples explications, évidement. Il fronça d'ailleurs les sourcils. Il connaissait de vue le père de Silas bien qu'il n'ait pas beaucoup croisé ce dernier. "Il a fait quoi d'impardonnable?" demanda t-il alors.
Puis Silas enchaina en lui répondant qu'il avait obtenu les droits de garde à temps plein, après avoir du se former aux formalités administratives et s'armer de patience. Murphy haussa les sourcils, enchanté d'apprendre cela. Il avait envie de voir le minimoys de ce fait, n'ayant pas vraiment eu l'occasion de le faire. Une fois de plus, son planning y avait été un grand facteur, outre le passage au prison du père, bien sûr.

"Bah je suis trop content pour toi. Ca lui fait quel âge maintenant? Mais c'est sûr, elle a dû bien pousser!" rit-il.

Et lorsqu'il demanda s'il pouvait aider en quoique ce soit, Silas suggéra de venir l'aider pour les travaux. Murphy but quelque gorgée de la bouteille qu'il avait à la main, puis :

"Avec plaisir! Ca me fera un peu les pieds. Ou devrais-je dire les mains! J'ai l'impression de moisir dans mon lit, faut que je me ménage, c'est pas bon ça!"

Bon, il faisait tout de même un peu de sport pour garder la forme, il ne fallait pas non plus exagérer. Après quoi, Murphy laissa son regard se perdre sur le paysage devant eux. De grands immeubles qui s'étendraient comme de grandes tours de château fort. En différent évidement, puisqu'il n'y avait pas de château .

"C'est marrant. Ca a l'air calme comme ça, mais quand tu t'approches [des immeubles], c'est soudainement méga agité."

Murphy le philosophe, chapitre inconnu. Peut être que l'alcool lui était un peu monté à la tête déjà.

Si Silas et Murphy étaient amis depuis la nuit des temps, ce n'était pas pour rien. Même si malgré cela, les deux avaient leur secret. Murphy en tout cas, en avait. Comme beaucoup de monde, surtout en ces temps ci couraient, Murphy avait lui aussi un besoin de s'isoler par moment. D'être loin de tout, de se remettre en question, de méditer, de se poser les bonnes questions. Ca lui permettait de ne pas se laisser ronger par les autres et par la vie, de savoir ce qui était le mieux et comment réagir face à toutes sortes de situations et de personnes. Et puis surtout, ça lui permettait de faire le nettoyage dans son esprit. Silas avait eu besoin de cela aussi. Murphy était plus que tout au courant de sa situation et il l'avait soutenu tout le long. Il continuait de le faire d'ailleurs, parce que cet homme ne méritait pas ce qui lui arrivait.
En tout cas, Silas lui avait arraché un rire avec ces paroles, puis il s'était remis à siroter sa binouze. Il était content de ne plus être seul, lui qui ne s'était pas forcément attendu à ce que son ami le rejoigne. Néanmoins, lorsque Murphy s'intéressa à ce qu'il s'était passé avec avec son père, sa fille, sa vie en général mais surtout cela, Silas lui dit quelque chose qui le fit recracher sa gorgée.

"Une tumeur?" répéta t-il comme s'il avait mal entendu alors que c'était très bien le cas. En tout cas, outre cela, Murphy comprenait les tracas que traversait son ami. Il secoua la tête alors qu'il réfléchissait à tout ceci, essayant de prendre du recul sur ces paroles là. Il avait l'habitude d'entendre des choses difficiles, mais bon, c'était toujours difficiles quand ça touchait des gens qu'on aimait. Il avait l'impression que c'était la merde chez tout le monde d'ailleurs.

"... Ok. Je vois."
Il n'arrivait pas encore à répondre quelque chose à cela. Certainement plus tard, lorsqu'il aura remis de l'ordre dans tout ça, à l'intérieur de sa tête. De toute façon, Silas n'avait peut être pas besoin de son avis ou quoique ce soit. Néanmoins, il était ravi que Silas ait eu gain de cause. Les arguments stupides qui l'avaient privé de son enfant n'avait pas eu gain de cause, heureusement.
Silas lui parla de sa fille d'ailleurs, lui apprenant l'âge qu'elle avait après que Murphy le lui ait demandé. Cela remontait, depuis sa mise en prison. "Effectivement, elle a eu le temps de grandir depuis ton absence! Elle doit être un tout petit bout de femme maintenant." Sa voix avait été douce et tendre, à imaginer Silas prendre le rôle de père qui lui était dû. "Ca se passe bien avec elle? Je veux dire.. Elle s'y fait aussi?"
Il n'avait pas pu s'empêcher d'être curieux. Lui même n'avait pas eu l'occasion d'être père, en tout cas... Pas encore. Il ignorait s'il avait envie de l'être ou non. Disons que ce n'était pas dans ses priorités mais s'il se mettait avec quelqu'un, cela changerait peut être la donne.
Silas lui donna une petite tape sur l'épaule, puis il lui demanda si ça allait. Murphy soupira. "Ouais, ça va, faut bien!" répondit-il en terminant sa cannette. "Mon frère est revenu il y a pas longtemps et... disons que... sa vie est aussi compliquée que la tienne en ce moment."
Murphy se força un sourire et reprit un air guilleret : "Heureusement, j'ai appris à me détacher de... ce qui est compliqué! Je suis là, en soutien, et je fais le nécessaire pour rendre sa vie meilleure mais... au fond, je ne suis pas magicien, même si j'aimerais bien! Et c'est tellement difficile de prendre du recul, si tu savais! Seulement, si je ne le fais pas, je me fais bouffer. Hors, il faut que quelqu'un reste debout alors.. tu sais... je m'y efforce."
Il exprima un rire, non pas amusé, mais pour détendre l'atmosphère. L'air perdu, il se focalisa sur un point dans le paysage au hasard. "Merci d'être venu" conclut il d'une voix paisible.