Me reconnaitras-tu, maman ?

« Nina & Cassandra »

{Cassandra} Je ne sais pas si elle m’a répondu, je ne sais même pas si j’étais vraiment là. Je passe une main sur ma nuque, puis je finis par oser lui demander « Excuse moi, j’ai pas entendu tes réponses, avec tout ce bruit ! » Boston ! New York ! Au final, ça change rien pour moi ! Mais j’ai envie et besoin d’en savoir plus sur elle. Cela m’étonne qu’elle m’ait pas encore posé de questions sur moi, mon enfance, mes rêves, … Je ne sais pas si je l’intéresse vraiment au final ou si venir ici était pas une mauvaise idée. Je suis renfermée, je dois légèrement tirer la gueule, mais je ne sais pas à quoi je m’attendais. A ça ? Peut-être ! Il faut dire qu’elle doit me prendre pour une jeune femme avec plein de tocs nerveux. J’ai déjà attaché et détaché mes cheveux en l’espace de dix minutes. Et je vais en faire d’autres des boulettes du style pendant le reste de ce rendez-vous. * Reste calme !* J’ai envie d’envoyer bouler cette voix qui veut me remettre sur les bons rails, qui veut que je reste calme et que je prenne tout avec philosophie. J’ai pourtant plus envie de lui déballer que rien ne va à cause d’elle. Et j’ai envie de lui demander pourquoi ? On ne laisse pas un enfant par manque d’argent ou de temps, on laisse un enfant car on n’en veut pas. Voilà ce qui m’a été dit toute ma vie durant. Que ce soit par les potes des foyers ou encore par les adultes qui devaient veiller sur moi. Alors j’y crois dur comme fer et j’aimerais réellement savoir ce que j’ai fait de mal.

J’avais envie de hurler et de pleurer quand elle me dit qu’elle aurait été plus un danger pour moi qu’autre chose quand j’étais bébé. Je ne l’aurais pas eue, elle non plus ! * Qu’est-ce qu’on fait là ? * J’en sais rien moi-même. Si elle m’a laissée tomber en toute connaissance de cause, si elle se prenait pour un danger pour moi, pourquoi elle m’a mise au monde ? * Egoïsme ! * Non ça peut pas être ça ! Pas une femme aussi altruiste qu’une infirmière ! Mais je me dois de lui poser la question ou plutôt de lui faire part de ma réflexion « Tu aurais peut-être mieux fait de me faire partir plus tôt alors ! » Je ne serais pas le monstre que je suis aujourd’hui, je ne serais pas cette femme aux multiples facettes qui n’est pas capable de prendre soin d’elle, qui risque sa vie tous les jours. Je n’aurais pas subi tout ce que j’ai subi. Est-ce que je peux lui en vouloir ? En réalité non, pourtant, je lui en veux, je lui en veux de m’avoir laissée ainsi aux prises à des monstres qui en ont fait un de moi.

Je ne sais pas pourquoi j’ai eu ce mouvement tendre vis-à-vis d’elle ! Etait-ce vraiment mon geste ? Etait-ce encore Gabriella qui voulait me pousser ? Putain, mais je fais quoi moi ? Je lui en veux, je lui en veux plus, je la déteste, je la comprends. Tout ça se mélange dans ma tête. Un instant, j’ai envie de tout lui balancer et de lui faire mal, très mal. Et l’instant d’après, j’ai envie qu’elle ne sache jamais rien de mon passé et de mon trouble ! Qui suis-je au final ? J’ai mal quand elle me dit qu’elle avait juste son meilleur ami, je la plains, je ne sais pas comment j’aurais fait. Est-ce que j’aurais géré ? Est-ce que à sa place j’aurais tout dit à ma famille ? Mais ça, je ne le saurai jamais car je n’ai pas de famille. Je n’en ai jamais eue ! Ma seule passion, qui n’est même pas commune à tout le monde dans ma caboche, c’est la création de jeux vidéos. Cela me permet de partir loin de ce monde, de m’imaginer ailleurs et de me vider l’esprit de toutes mes complications. « Il est où aujourd’hui, ce meilleur ami ? Tu le vois encore ? » Je me mordilles la lèvre inférieure alors qu’elle me dit que son choix aurait été tout autre si elle avait su mon enfance aussi difficile, je lui lâche « Je suis atteinte du trouble dissociatif de l’identité. Tu veux toujours me connaître et avoir une gamine pareille ? » J’ai toujours souffert de ce trouble. J’ai toujours souffert de la différence et du regard des autres. Entre ceux qui ne me croient pas, ceux qui pensent que c’est comme dans les films, que je vais les buter pendant leur sommeil et pire encore, celles et ceux qui me prennent pour une bête de foire, je n’ai jamais su me faire à cette merde que j’ai dans la tête et dans le corps. Je connais la peur, le doute, le syndrome de l’imposteur, la douleur, mais est-ce que je pourrais enfin connaître la sensation d’avoir quelqu’un qui serait là pour moi ?

Me reconnaitras-tu, maman ?

« Nina & @Cassandra McKay    »

TW : notion d'avortement

Cassandra semblait très anxieuse, perdue. Je voyais son regard s’agitait comme si elle faisait une crise d’angoisse ou quelque chose dans le genre. Je me sentais désarmée, cela aurait été une patiente, j’aurai su quoi faire, mais là, il s’agit de ma fille et je suis perdue. C’est donc ça se sentir mère, perdre ses moyens devant la souffrance de son enfant. Non Nina, tu n’es que sa mère biologique, certes, tu l’as toujours aimé, mais tu n’as pas le droit d’agir comme ça avec elle, elle a sûrement une merveilleuse famille qui l’attends à la maison, tu n’as pas le droit comme ça pour votre première rencontre d’agir de la sorte, ressaisis toi, laisse lui du temps. « Tu es sûre que ça va, Cassandra ? » Dis-je d’une voix douce, je m’inquiétais de la voir aussi perturbée, je voulais qu’elle s’apaise. Je ne lui veux aucun mal bien au contraire, je veux que notre rencontre nous apaise toutes les deux et pas qu’elle créer plus de mal qu’il n’en a déjà été fait.

Je raconte mon histoire à la jeune femme, les raisons qui m’ont poussé à l’abandonner, pourquoi je ne l’ai pas élevé moi-même. J’ai fait de piètres choix durant ma jeunesse, je m’en rends compte au vue des remarquer que ma fille biologique peut m’envoyer au visage. Je ne lui en veux pas, elle n’a pas tort dans ses propos, j’ai merdé. J’en viens à avoir le souffle coupé quand elle me demande pourquoi je n’ai pas renoncé à elle plutôt. Elle me parle d’avortement clairement et ça brise quelque chose en moi. Cela me brise parce que je pensais arriver à l’assumer, j’ai encore une fois laissé ma fierté parlée, persuadé que j’allais m’en sortir alors que ça n’a pas été le cas. « Je ne pouvais pas me résoudre à faire cela, je pensais trouver une solution pendant ma grossesse, je pensais que j’allais pouvoir te garder. Mais le jour de l’accouchement face aux paroles des sages-femmes, j’ai réfléchi et je me suis rendu compte de la vie que je menais et que tu méritais tellement mieux que ce que j’avais à t’offrir. » Je baissais le regard à nouveau, me sentant fautive, d’avoir carrément merdé le peu de temps que j’ai été une mère pour elle.

Je lui dit tout, tout ce qu’elle veux savoir, je lui dis, je n’ai pas de secret pour elle. Je n’ai pas pris les bonnes décisions et je les assume, je veux être la plus transparente avec elle. Elle a le droit de tous savoir de moi, comme tout le monde, je fais des erreurs personne n’est parfait encore moins quand on devient maman beaucoup trop tôt. Elle me pose des questions sur Enzo mon meilleur ami et une fois encore, je lui réponds honnêtement. « Lorenzo est ici à New York et oui je le vois toujours pourquoi ? » Je ne comprends pas sa curiosité pour Enzo, mais je sens que je vais vite avoir des réponses. Elle semble toujours aussi perturbée et je m’inquiète de plus en plus quand tout à coup elle lâche la bombe et mon cœur ne fait qu’un tour. Un trouble de l’identité, c’est donc pour cela qu’elle semble si agitait. Je connais cette maladie, je sais combien les gens peuvent en souffrir. Elle croit que je vais fuir devant cette annonce, mais non, cela ne change rien pour moi, elle est mon enfant et je veux la connaître. Je dépose une main sur la sienne et plante mon regard dans le sien. « Bien sûr que oui que je veux de toi Cassandra. Tu es ma fille, j’ai tant de fois regretté de t’avoir laissé alors ce n’est pas une maladie qui va me faire peur crois moi. » J’étais déterminé à lui faire comprendre que si elle veut de moi, je serais là. « Tu ne sais pas combien je suis contente que tu sois venue à moi et cette fois, je ne te lâcherai plus. » Non, elle était mon enfant, cette partie de moi qui m’a tant manqué, je compte bien rattraper le temps perdu.

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« Nina & Cassandra »

{Cassandra} Je vois ses lèvres bouger, mais je n’entends pas ses mots ! Je n’entends que le bruit de l’agitation autour de nous. Les rires des trois jeunes à la table à côté. Le type au comptoir à l’autre bout du bar qui hurle au téléphone contre ce qui doit être un de ses employés. J’entends même la conversation de l'alcôve derrière, où ils parlent d’opérations et d’autorisation de la famille. Mais elle, ma mère biologique, je ne l’entends pas ! Je passe une main sur mes yeux, sur mon front et je continue dans ma chevelure détachée. Est-ce de l'inquiétude que je dis dans son regard ? Pourquoi serait-elle inquiète ? Elle ne me connaît pas ! * Reprend toi, calme toi * Je prends une grande respiration et je joue avec mes doigts pour tenter de me concentrer sur quelque chose à la table, tenter de revenir à la conversation. Comment voulez-vous qu’elle ne me prenne pas pour une folle ! * Elle le fait déjà ! * Je vois son regard me poser des tonnes de questions, je finis donc par lui faire un sourire, espérant que ça lui suffira comme réponse à quelque soit la question qu’elle m’a posée.

Et puis, il y a cette question, pourquoi ne pas avoir mis fin au calvaire en avortant. Oui, je me pose souvent la question. Car si c’était pour m’avoir et me laisser tomber comme un kleenex usagé, j’aurais préféré ne jamais naître. C’était égoïste de sa part ! Même si une petite voix dit tout au fond de moi que je la comprends. Mais non, je ne veux pas avoir de la pitié, de la compassion ou de l’amour pour cette femme. Je ne veux pas me laisser avoir. Je soupire alors assez bruyamment * Une ado, t’es qu’une ado rebelle ! * Oui, je réalise que je ressens à ça, au final, une ado de merde, mais n’est-ce pas ce que je suis ? Je ne sais pas comment je dois me comporter, ce que je dois écouter, accepter ou refuser dans ses paroles. Je voyais qu’elle était triste ou un sentiment du style quand elle eu fini sa phrase. Je lui dis alors « Mes questions te gênent peut-être et j’en suis désolée. Je veux juste comprendre qui je suis et d’où je viens.» Ce que je ne dis pas, c’est que je ne suis pas sûre de ce que je ressens, ni si c’est bien moi qui le ressent. Mais j’ai envie de savoir d’autres choses, des idioties, mais je ne sais pas si ça pourrait m’apprendre des choses « Tu avais des envies pendant que tu m’attendais ? Tu sais genre fraise, chocolat … ? Et … j’ai des frères et des soeurs ? » Voilà la vraie question qui m’intéresse ! A-t-elle des enfants qu’elle a gardé ?

Quand je lui demande si elle voit toujours son meilleur ami, j’avoue que j’ai mes idées derrière la tête. On dit toujours que le meilleur ami est le frère qu’on choisit non ? Alors si elle l’a choisit dans sa vie, le rencontrer pourrait me dire qui elle est. Il est ici,à New York. Je fais un petit sourire, puis je lui réponds le plus honnêtement possible à mon tour « Parce que je me dis que, si on reste en contact toi et moi, il serait celui qui pourrait me dire le plus de choses sur toi, pour que je te connaisse vraiment ! » Mais je finis par lui dire la vérité sur le trouble dont je soufre depuis mon enfance. Ce TDI qui me fout la vie en l’air. Ou qui m’a sauvé la vie ! Je ne sais plus si c’est une bonne ou une mauvaise chose d’avoir cet esprit totalement détraqué ! Quand elle pose sa main sur la mienne, mes doigts se crispent, mais je reste là. Je ne bouge pas ! Mon regard revient au sien * Méfie toi * J’ai les larmes qui me montent aux yeux lorsqu’elle me dit qu’elle veut de moi, qu’elle est contente que je sois venue à sa rencontre. Je sens un sanglot s’arrêter et me bloquer au niveau de la gorge. Je pince mes deux lèvres l’une contre l’autre et je finis par lui dire « Je … Je sais pas comment je dois réagir ! » Normalement, c’est le moment où les gens s’enfuient, posent des tonnes de questions pour voir à quel point ça va les impacter eux. Non Nina est bien la première personne qui me promet une telle chose. Dois-je la croire ? « Je vais pas te mentir Nina, je sais pas si je peux te croire ! Tu sais pas qui je suis, j’ai peur qu’une fois que tu le sauras, tu disparaisses à nouveau. Mais … » Je prends une grande respiration avant de rajouter « … Je pourrais avoir ton numéro de téléphone, on pourrait manger un bout ensemble la prochaine fois, non ? » Je vais devoir partir d’ici, si je ne veux pas faire une crise. Je dois retrouver ma chambre, mes habitudes, un tant soit peu pour ne pas craquer. Et puis, quand je serai à nouveau dans un état assez potable pour la revoir, je la rappellerai. Je veux y aller lentement pour nouer un lien que j’espère inébranlable entre elle et moi !

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« Nina & @Cassandra McKay    »

TW: notion de fausses couches

Cassandra me déstabilise complètement, elle semble mal à l’aise, mais en même temps est très frontale dans ses questions. Une fois mal à l’aise et la fois d’après très directe et cherchant à savoir son histoire. Je lui demande si elle va bien, mais je ne reçoit qu’un sourire pour réponse, je ne cherche pas à en savoir plus après tout, si elle n’a pas envie de se confier à moi, elle en a tous les droits, je ne suis personne, seulement la mère biologique qui n’a pas eu le courage de l’élever.

Je réponds à chacune de ses questions, toujours avec honnêteté, je me suis toujours dit que le jour où mon enfant viendrait à moi, s’il le faisait, je lui dirais tous dans les moindres détails. Je préfère partir sur des bonnes bases, certes nous n'avons peut-être pas les mêmes points de vue, mais elle saura tous de moi, elle n’aura qu’à trancher si elle veut toujours me connaître ou non. Plus je lui livre mon histoire et plus je me sens honteuse. Je m’en suis voulu toute ma vie de l’avoir fait adopter, je n’ai pas censé de penser à elle chaque jour de ma vie. « Non, tes questions ne me dérangent pas du tout, au contraire, tu as le droit de tous savoir, ne t’inquiètes pas, ça va. » Je lui fis un sourire pour la rassurer, mais aussi pour redonner le courage d’encaisser mes décisions passées. « Des envies, oui, j’avais tout le temps envie de pâtes, en tant qu’italienne, c’était le pompon. » Je fis un petit rire. « Non, tu n’as pas de frère, ni de sœur, après toi, je n’ai pas pu retomber enceinte… » Je baissai mon regard, oui, j’avais essayé d’avoir d’autres enfants avec mon ex-mari, mais tous se terminait par des fausses-couches ou des échecs, au bout d’un moment, on a préféré arrêté d’essayer, ce qui a causé la fin de notre couple.

Cassandra m’avait demandé si j’avais encore des contacts avec mon meilleur ami, je lui répondis par l’affirmative même si je ne savais pas vraiment où elle voulait en venir avec cette question. C’est alors qu’elle m’expliqua qu’à travers ses yeux, elle pourrait encore mieux me connaître. Mon cœur se pinça, alors elle voulait en apprendre plus sur moi, je ne l’avais pas fait fuir avec mon histoire. Je suis si heureuse à cet instant, j’allais pouvoir découvrir moi aussi mon enfant et pourquoi pas développer une vraie relation avec elle. « C’est avec plaisir que je te le présenterais, je suis sûre qu’Enzo sera lui aussi ravi de te revoir. » C’est ce dont j’avais toujours rêvé. Elle me confie souffrir de troubles du comportement, mais je la rassure en déposant une main sur la sienne, je n’ai pas peur de gérer ça. J’ai la chance de pouvoir la rencontrer et je ne suis pas prête à la laisser repartir. Elle semble hésiter à me croire et c’est tout à fait normal, on se connaît à peine toutes les deux. « Je ne veux pas que tu me mentes, au contraire sois honnête avec moi et je me doute bien que tu ne vas pas me faire confiance à la première seconde. Je te prouverais avec le temps que tu peux me croire. » Je lui souris à nouveau. Je n’étais pas vexé bien au contraire, à sa place, j’aurais réagi de la même façon. On a besoin de temps aussi bien l’une que l’autre pour apprendre à se découvrir. « Oui, avec plaisir, tiens passe moi ton téléphone. » Je tendis la main et attrapai le cellulaire qu’elle me donnait. Je rentrai mon numéro dedans et je m’appelai pour une lui prouver que c’était le bon et de deux avoir moi aussi son numéro. « Et voilà. Appelle-moi quand tu veux, si je ne te réponds pas, c’est que je suis au travail et je ne peux pas toujours répondre à la minute selon les interventions. » Je préférais la prévenir, parfois, je pouvais mettre des heures à répondre à mes proches selon les opérations prévues. Je lui rendis son téléphone illico.

Me reconnaitras-tu, maman ?

« Nina & Cassandra »

{Cassandra} Depuis que j’ai eu ne fut-ce que l’idée de venir trouver ma mère biologique pour la confronter, je sens que je suis continuellement sur la corde raide. Tous mes alters se bousculent en moi, ils veulent tous leur place, leur mot à dire. Je sais que c’est juste dans ma tête, que c’est un moyen de me protéger. Me protéger de moi-même et de mes souvenirs ! Je me sens fragile comme jamais. J’ai l’impression la majorité du temps que je ne suis qu’une marionnette prise au piège et commandée par une toute autre personne. Tout ce que je ressens ne m’appartient pas, ce que je vois est la seule chose en laquelle je peux être certaine. Les phrases qui sortent de ma bouche ne sont pas toujours les miennes et les mimiques que je fais sont elles aussi à une autre. Qui suis-je ? Je savais pertinemment que la voir, la rencontrer, connaître enfin mon histoire, allait me chambouler, mais je n’imaginais pas que ça serait à ce point-là ! Et puis, j’ai ce sentiment de l’imposteur que je porte toujours en moi et cela depuis que je connais le diagnostic. Ce sentiment que je suis juste folle, que je ne mérite pas toute l’attention que mes psys m’ont donnés, que je ne suis pas malade, que je suis juste bizarre. Alors je n’arrive pas à rester Cassie bien longtemps, je n’arrive même pas à répondre à une simple question, car je suis totalement dépersonnalisée. J’ai même l’impression oppressante que certains de mes alters ne veulent pas me laisser continuer cette discussion, veulent me faire taire.

Mais je finis par m’excuser de mes questions, de mes réactions aussi dans un sens. Elle ne devrait pas subir cette constante bataille que j’ai en tête. Personne ne devrait subir ça ! Et puis, je suis agréablement surprise que Nina réponde à tout, même aux questions les plus débiles passant le barrage de mes lèvres, comme si c’était Neige qui avait pris possession de ma parole. J’ai un petit rire amusé quand elle me parle de son envie. Un rire assez enfantin et là, je sais que j’ai raison, Neige est en co-front, mais elle me laisse le contrôle. Ma petite chipie veut juste connaître Nina ! Tout comme moi ! Puis au sujet des frères et des soeurs, égoïstement, je suis rassurée et heureuse d’avoir été son seul enfant. Je ne sais pas si j’aurais supporté qu’elle en ait élevé un autre moi. C’est égoïste et méchant, je le sais, mais je ne peux y faire fasse. « Un jour, peut-être, que je pourrai moi aussi découvrir mon côté italien ! » Je lui fais un petit sourire, puis je lui réponds au sujet des autres enfants, voir si elle en veut toujours d’autre ou non « Tu n’es pas encore trop vieille pour en faire d’autre des enfants. Ton copain et toi, vous en voulez d’autres ? » La vraie question est “ Es-tu en couple ? “. Je me doute qu’elle n’a pas parlé de moi si jamais elle a un petit ami, mais j’aimerais savoir si oui ou non, je dois m’apprêter à rencontrer l’homme de sa vie. Je ne vais pas mentir, ça me foutrait la trouille. J’ai beaucoup de mal avec certains hommes. Je me braque rapidement, pour un geste, une parole, un regard. Mais bon, je me doute que si elle l’aurait choisi, il devrait être bien, non ?

Me revoir ? Je plisse un peu le bout de mon nez, mimique que je fais très souvent quand Neige est en co-front. Le co-front, quand je ne suis pas la seule au contrôle de mon corps et de mes sentiments, de mes gestes, de mes paroles. Puis je finis par lui dire « Euh, il va tout de même devoir que je me prépare à cette rencontre ! » Je me mordille la lèvre. Il est vrai que je dois faire attention, j’ai pas envie qu’il sache directement que je suis folle à lier. Je veux au moins lui faire une première bonne impression. Donc je vais me préparer mentalement à le rencontrer. Je lui dis alors pour mon trouble et elle semble me comprendre et ne pas le prendre mal. Ca me rassure quelque peu ! J’avoue que j’ai eu longtemps peur que c’était parce que j’étais pas normale, pas comme les autres enfants qu’elle m’avait laissée tomber. J’ai souvent cru que je ne méritais pas d’avoir une maman qui m’aimait et s’occupait de moi. Je lui fais un sourire franc et vrai quand elle me dit qu’elle prendra tout le temps pour me faire voir qu’elle est de confiance. J’ai envie de pleurer et en même temps, je suis toujours en colère. Je me sens tiraillée entre l’envie de l’envoyer bouler, mais surtout celle de lui dire que j’ai envie de la revoir. Je ne sais pas du tout ce que je dois faire, ce que je dois dire. Je suis déjà super contente d’avoir eu la possession de mon être la majorité du temps, je suis fière de moi. Même si je dois beaucoup bailler, si je dois souvent être à côté de la plaque. « A notre prochaine rencontre, je répondrai à toutes tes questions, mais … Mais là, je ne me sens pas de … Enfin je suis désolée ! » J’arrive plus toujours à trouver mes mots, à rester dans la conversation. Je vais subir un switch et je veux finir la conversation avant. Je veux qu’elle ne voit que l’infime partie de moi qu’elle a déjà rencontrée jusqu’à présent.

Je la laissais prendre mon téléphone, y noter son numéro et avoir la tendre attention de me prouver que c’était pas un fake. Je lui fais un sourire reprenant mon téléphone et je finis par lui dire « Merci… Nina… Je dois t’appeler Nina ou … Désolée, je suis un peu retournée ! Mais je serais heureuse de te revoir assez vite. » Je me lève, je tire sur mes manches pour me donner une certaine contenance, puis je viens poser un baiser sur sa joue « Merci pour le café ! A très vite !» Et je m’en vais avant de lui faire peur avec mon trouble qui peut être impressionnant pour celles et ceux qui ne la connaissent que par les livres ou les docus !

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TW: notion de fausses couches

Cassandra veut tout savoir et je lui sers mes réponses sur un plateau, je ne me sens pas légitime à lui cacher la vérité, j’ai merdé dans le passé en l’abandonnant alors bien sûr que je lui dois de répondre à chacune de ses questions. Pour le moment tous se passe bien, je dirais, nous échangeons posément, apprenant quelques peu à se connaître. Bon, je l’avoue, c’est surtout moi qui réponds à des questions, mais je m’en moquais, je suis heureuse de l’avoir devant moi, je la scrute, elle est si belle, son visage d’ange me fait penser à ma mère plus jeune, c’est affolant.

« Oui, je te montrerais toutes les recettes que je connais, je t’apprendrais la langue, bon je ne la maîtrise pas totalement, mais le peu que je sais, je te l’enseignerais. » Je lui souris ravie de peut-être partager quelque chose avec elle dans le futur.

Elle me pose alors des questions sur ma vie, si j’ai des enfants, je lui réponds que non, la vie ne m’a pas permis de mener une grossesse à terme à nouveau. Malgré moi, cette question me pique, j’ai beaucoup souffert de l’avoir fait adopter, mais j’ai aussi beaucoup souffert de mes fausses-couches. J’aime les enfants, j’aurais aimé en avoir d’autres, mais je ne peux pas apparemment, toutefois, je me ravis, de voir Cassandra débarquée dans ma vie. J’espère que nous arriverons à rattraper le temps perdu. « Ce n’est pas une question d’âge, j’ai été marié et nous avons essayé d’avoir des enfants, mais cela n’a pas fonctionné, c’est d’ailleurs la raison de notre divorce. » Je ne suis pas fière de parler de l’échec de mon mariage, je ne regrette absolument rien, mais ça me fait un pincement au cœur de me dire que si j’avais eu un enfant, je serais peut-être encore marié. « Et du coup, je suis célibataire en ce moment. » Je ne sais pas si c’est ça qu’elle voulait savoir, mais je lui dit quand même, cette information n’est pas négligeable pour elle peut-être.

J’avais hâte de la revoir et de la présenter à Enzo, lui qui l’a couver comme un père, si je puis le dire. Mais Cassandra semblait effrayée par cette rencontre, je me suis légèrement emballé. Je suis tellement excité de la revoir que je n’ai pas fait attention au ressenti qu’elle pouvait avoir. « Je suis désolé, je me suis un peu emballée, on ira à ton rythme bien sûr. » Je lui souris pour la rassurer. C’était elle qui dirigeait, moi, je suivrais le rythme qu’elle décide de choisir. Elle semble perturbée de ne pouvoir répondre à mes questions ou de me livrer plus de choses pour elle, je sens le stress et la panique dans son regard et je n’aime pas la voir ainsi, instinct maternel qui parle. « Ne t’excuse pas Cassandra, on va à ton rythme, je ne veux pas que nos retrouvailles soient un stress pour toi bien au contraire. Alors prends le temps qu’il te faut et quand tu en as envie tu me contactes d’accord. » Je souris toujours pour lui montrer que je suis ok, que je n’ai pas peur d’elle.

Elle semble pressée de partir, sûrement prise par une vague de stress et je le comprends. Je la laisse faire, elle se connaît donc si elle juge qu’elle doit partir, je ne dirais rien, j’attendrais qu’elle revienne vers moi le moment venu. « Ne t’excuse pas, tu m’appelles comme tu le sens, on a tout le temps de voir comme on s’appelle plus tard. Moi aussi, je suis heureuse de t’avoir rencontré Cassie. Va te reposer s’il te plaît, je ne veux pas que tu finisses aux urgences à cause d’une trop grosse émotion. » Je suis étonnée qu’elle vienne déposer un baiser sur ma joue, mais ce geste m’inonde de bonheur, mon cœur tape tellement fort, j’en ai les larmes aux yeux, mais ne montre rien, ne voulant pas la mettre mal à l’aise. « A très vite bella. » Je la regarde s’en aller mon cœur rempli de joie. J’ai retrouvé ma fille, enfin, elle m’est revenu. Je laisse perler une larme de bonheur sur ma joue tout en finissant mon café.